La Grande Pêche, une odyssée humaine

Le port de Binic ne serait pas devenu ce qu’il est aujourd’hui sans le développement de la pêche à la morue à Terre-Neuve et « à » Islande : ce que l’on a appelé « la Grande Pêche ». Un projet de parcours maritime vise à rendre hommage à cette époque.

De nombreux ports sur toute la façade littorale atlantique et de la Manche ont armé des navires pour la Grande Pêche. La baie de Saint-Brieuc est bien représentée avec Paimpol, le Portrieux, Le Légué, Dahouët et Binic. Pour réactiver les mémoires et redonner à voir ce passé maritime, la municipalité s’est engagée pour la mise place d’un parcours d’interprétation sur le port de Binic.

Une histoire à redéployer

Une histoire qui a construit l’identité du territoire

Avec la présence de ses navires sur les côtes canadiennes dès le 16è siècle, Binic se hisse en 1845 au premier rang des ports de Grand Pêche à la morue, avec 37 navires et 1700 hommes embarqués. Le port accueillera jusqu’à une cinquantaine de navires morutiers en 1850.

Cette grande épopée, à son apogée à la fin du 19è siècle, contribue au développement des infrastructures du port de pêche, à la construction des maisons d’armateurs, au développement des activités connexes : chantiers naval, corderies, forges, salaison, commerces…

Les traces effacées du passé morutier

Les belles goélettes et toutes ces activités ont progressivement disparu du paysage portuaire de Binic pour faire maintenant place à la station balnéaire que nous connaissons aujourd’hui. Peu d’éléments dans l’espace public permettent d’évoquer cette histoire qui est restée dans les mémoires, mais de façon diffuse pour beaucoup de nos contemporains. Pourtant la connaissance de ce passé apporte une épaisseur supplémentaire aux lieux actuels, et en accentue l’intérêt.

Un sauvetage de la mémoire in-extremis

Les historiens locaux ont travaillé avec beaucoup de passion pour rédiger leurs ouvrages sur l’histoire maritime et celle de la grande pêche. Ils ont arpenté les archives, récolté des témoignages tant qu’il était encore temps, collecté des objets qui évoquent cette époque faste. Grâce à ce travail, il est aujourd’hui possible de comprendre les conditions de vie de l’époque, les techniques employées, et plus globalement tout ce qui a trait à ce sujet.

Une prise de conscience de la richesse de l’histoire

En étudiant d’un peu plus près cet héritage, les acteurs ont pris conscience de la richesse de ses traces, de la portée des témoignages, du lien avec l’histoire de France et ses colonies américaines. Les activités de pêche dépendaient fortement des relations internationales avec le Royaume Uni et l’Islande notamment sur la question des droits de pêche sur les eaux territoriales.

 

Le projet global de valorisation

La commune a souhaité créer une forte sensibilisation sur le sujet tout en se montrant consciente de la nécessité d’être juste et sincère dans le rappel des faits historiques, techniques et humains. Plusieurs axes de travail ont été menés de concert pour valoriser la mémoire, les lieux et l’histoire sous différentes formes, car un seul mode de médiation ne pouvait suffire.

Déterminer un titre, un logo et un univers graphique

Pour rendre visible et affirmer l’identité du parcours dans l’espace public, l’agence Médiapilote a guidé la ville dans le choix d’un nom juste et percutant, d’un logo attractif et d’une charte graphique qui seront déclinés sur les panneaux d’information et les supports de communication.

Une forte personnalité de Binic de l’époque de la Grande Pêche, l’armatrice Maria Verry-Carfantan, véritable femme de poigne, a été redessinée pour devenir l’ambassadrice du parcours.

Une scénographie immersive

Le projet scénographique consiste à créer un parcours innovant, attractif et respectueux des faits historiques. Le souhait des élus s’est porté sur la sortie d’un schéma classique de parcours uniquement composé de panneaux répartis sur un circuit. Tous les systèmes de médiation ont ainsi été envisagés pour rendre acteur le visiteur : images, sons, audiovisuel, expressions artistiques, scénographies. L’originalité vient de la diversité des stations envisagées.

La mission confiée à l’agence de scénographie 47 Nord avec Olwen Gaucher vise à finaliser la conception artistique et technique des stations du parcours.

Portraits des passeurs de mémoire

Screenshot
Screenshot

Le projet audiovisuel « Passeurs de Mémoire » vise à conserver la mémoire locale sur l’histoire maritime de Binic, en interrogeant différentes personnalités de la commune. L’objectif ? Explorer les 6 thématiques abordées dans le parcours d’interprétation au travers de quelques portraits. Ces vidéos seront partagées avec le plus grand nombre par un accès QR code sur le parcours ou un visionnage en ligne.

Ce projet de captation et montage vidéo a été confié à la Coopérative ESKEMM FILM et la réalisatrice Clara-Luce Pueyo avec un objectif de 6 courts métrages de 6 minutes.

Conception du parcours d’interprétation

Une dizaine de stations, ont été sélectionnées à partir de l’inventaire des lieux et du potentiel d’exposition sur l’espace public afin d’initier le public à l’histoire maritime :

  • Une famille d’armateurs
  • La campagne de pêche
  • Le chantier naval
  • L’avitaillement des navires
  • Les voiliers de pêche
  • La pêche d’hier à aujourd’hui
  • Les récits de voyage
  • Les conditions de vie à bord
  • La dévotion des gens de mer
  • Le cimetière maritime

Différentes situations ont ainsi été envisagées :

  1. Une valorisation classique de lieux patrimoniaux publics faciles d’accès (espaces du port, église, cimetière).
  2. Des espaces scénographiés, sur l’espace public exprimant l’histoire, les technologies passées, les récits de navigation pour rendre acteur le visiteur du parcours (famille d’armateur, campagne de pêche.
  3. L’intégration d’une structure partenaire, pour l’hébergement d’une station dans leurs locaux afin de créer un lieu de transmission du patrimoine (le pôle nautique).

Séquençage du projet

Plusieurs étapes ont permis la mise en place du projet :

  • 2021 : démarrage du collectage (durée effective : 3 mois et ½). Rencontres multiples, collectages et enregistrements.
  • 2022 : esquisse du parcours (7 mois de juin à déc). Inventaire des espaces, synthèse patrimoniale, appropriation historique, scénario général de parcours, esquisse des stations, rencontre avec les partenaires, traitement des enregistrements, évaluation budgétaire.
  • 2023 : mission des prestataires (durée estimée : 1 an) : communication, vidéos, et scénographie, soumission du projet et accord de subvention des Fonds européen pour les affaires maritimes, la pêche et l’aquaculture (FEAMPA).
  • 2024-2025-2026 : finalisation, lancement de l’appel d’offre de réalisation, mise en œuvre du chantier.

Ressources